En introduction : la cacographie est une orthographie erronée. Les noms propres sont souvent victimes de cacographies dues à un mauvais passage d'une langue à une autre.
Ceci se produit, entre autres souvent dans l'écriture des documents anciens ou dans leur interprétation actuelle, par confusion entre les mots jusan, juzan, juson, juzon, susan, suzan, suson, suzon, issus du latin, déjà peut-être mal écrits, ou mal lus de leur écriture manuscrite ancienne.
Ils sont censés signifier bas ou haut en français, beherea-beheiti ou goi-gora-garai en euskara et ont donc des significations opposées.
Dans leur interprétation actuelle, la finale "an" fait référence au bas ou beherea, et la finale "on" au haut ou garaia.
- L’hypothèse romane de Georges Laplace est aussi celle avancée et argumentée par Xabier Elosegi, lequel voudrait que Lahetjuzan, Lehetchipi, Lehetebehere soient un seul et même nom. Le juzan français et le behere ou le beheiti basque ont en effet le même sens et le premier servira souvent à romaniser les deux suivants au hasard des document anciens.
Les premiers textes écrits de quelque importance apparus dans la région étaient des documents administratifs romains, ordonances, états d’inventaires, …, écrits en latin (quoique les Ibères et les Uaskon ou Vascones aient eu aussi un alphabet durant les quelques derniers siècles avant notre ère).
Au cours du Moyen Age on continue d’écrire uniquement en latin d’abord et les noms basques sont latinisés, puis on glisse insensiblement aux langues dérivées du latin, français et gascon, occasionnellement castillan, langues dans lesquelles les scribes continuent à romaniser les noms basques.
On aura ainsi dans le Cartulaire de Sorde (1068-1172) ou le Livre d’or de Bayonne (1083-1250), pour les mêmes maisons : Elizetxe = Labadie, Landa zahar = Lane bieyle, Larrea = Le Lane = La Lande, Agerrea = Guerre, Iri beri =Vila nova = Bilenave, Etxarte = Charte, Zalduzahar = Sautvieux, Lakoaga Cloague, Arsoritz Suzon, Zaldubeherre = SautduBas, Olhasogaray Dolhaissuperiori, Uhartebehere = UhartIusan, Jaubeheytia = Salle Jusan,
« Ainsi, dit Orpustan, furent écrits pour la première fois de leur existence (déjà multiséculaire pour la plupart), non sans nombreuses cacographies ... des centaines de domonymes et toponymes basques, la plupart du Labourd, ... »
Lehetebehere = Lahetjuzan qui en est la forme romanisée, sans doute déjà ancienne, comme aussi à Ustaritz pour la rue de Hiribehere qui descend de BourgSuzon vers Hiribehere
D’autant que si Lehetebehere est cité autour de 1600, il disparaît au profit de LahetJuzan, qui n’apparait jamais comme nom de maison, sauf pourtant en 1568, et donc déjà auparavant, « seigneur de Lahet Jusan » en application de l'ordonnance du Roi François 1er, Edit de Villers-Côtteret, Aout 1539. (voir par ailleurs le sens que l'on donne au mot seigneur dans ce texte). Le nom complet étant de Lahetjuzan d'Olha, Olha étant la maison infançonne.
Lj est cité par la suite pour 109 naissances ou baptêmes dans les périodes analysées alors que Lehetchipi continue aussi d’être cité en coïncidence d’époques.
Et on a donc LahetJusan = Lehetebehere, mais probablement pas Lehetxipi !
(Noter Arsoritz Suzon dont on verra dans l’historique des Lahet qu’en 1147 la Commanderie appartenait à Marie de Lahet de Sare ! A constater donc dés 1147 un rapprochement des patro/domo/toponymes Lahet et Suzon)
Choisissons ces exemples complexes pour montrer les difficultés que l’on rencontre lorsqu’on essaie de glisser, en étymologie d’un mot à l’autre, comme dans les pages précédentes, pour essayer de trouver un sens au premier ou le cheminement par lequel on aurait pu passer de l’un à l’autre, cheminement qui conduira les uns à l’évidence, d’autres au doute ou au rejet.
Le français jus, l’espagnol diuso, le provençal jos, l’italien giu, viennent tous du latin deorsum et signifient tous « en bas ». Ce qui pour être vrai n’en est pas pour autant évident surtout si l’on remonte vers l’origine du mot .
D’autant moins que sus, lui, signifie dessus !
La difficulté de l’« art » consistera donc dans ce type de recherche à se documenter du mieux possible, à être imaginatif dans la démarche mais non extravagant dans les conclusions, à ne pas produire d’arguments fallacieux pour accréditer des hypothèses qui plaisent (ce qui est la moindre des choses), à ne rien rejeter de ce qui déplaît, …et on aura tout de même, en l’absence de preuve formelle, à affronter le doute du sceptique ou la condescendance de l’ignorant comme du « sapiens ».
La critique est aisée, dit justement la sapience, …
Une certitude pour Lahet : ce nom indigène très ancien existe en Euskal Herri en nom de lieux, Lehete, Lekete cités avant l’an 1000.
Il existe en patronyme, Le(h)et, Let, Lahet, cité dès 1100 à Sare et en Navarre, attesté par la recherche historique ; origine et sens quasi incertains : proto-basque ou archaïque, roman, basque ancien, …
Une certitude pour Juzan : fréquent, entre autre dans les anciennes familles de Basse Navarre, attesté par la recherche historique, incertitude moins forte que pour Lahet sur l’origine, probablement par romanisation de behere.
Les incertitudes sur Lahet et Juzan sont gages d’ancienneté pour le nom, historiquement confirmés, puisque Lahet Jusan est cité en 1568, antérieurement constitué à partir de Lehet, lequel est cité pour Sare à partir de 1147, en fait depuis 1114, le toponyme et donc le patronyme existant ailleurs dès avant 952 .
!! Heureux les dénomés Goikotxea*, Burguburu*, Etxemendigarai*.
Bienheureux les Espil*, Espilkueta*, Espilkuetagarai* et autres Espilkuetagaraikolarrea* : la certitude de la connaissance leur appartient.
Goi-ko-(e)txea = maison du haut,
Burgu-buru = extrémité du village,
Etxe-mendi-garai = maison sur la montagne,
Espil = espace clos,
Espil-ku-eta = nombreux espaces clos,
Espil-ku-eta-garai = haut lieu des nombreux espaces clos,
Espil-ku-eta-garai-ko-larre-a = la lande au dessus des nombreux espaces clos.
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