Les Pyrénées, donc la Navarre, étaient déjà habitées il y a 30.000 ans. Et bien avant d’ailleurs.
Pourquoi alors citer précisément cette époque ; et pourquoi la Navarre ?
Parce que nos ancêtres de cette époque, de la glaciation commencée il y a plus de 70.000 ans auparavant, étaient quasiment identiques à ce que nous sommes aujourd’hui, aux vêtements et au body spray près bien sûr et que, dans son ancienneté, notre idiome euskarien d’aujourd’hui, tant dans sa structure que dans son vocabulaire*, porte témoignage des langues que les Gravettiens de Cro-Magnon d'il y a 30.000 ans ont élaboré ; ou utilisé, car peut être pré-existait-il déjà !.
*tous les outils en pierre taillée de ces époques, outils en métal toujours utilisés aujourd'hui, portent les mêmes noms à ces dizaines de milliers d'années de distance, avec des noms en "aiz" ou "haitz" signifiant pierre, (et non haritz, signifiant chêne), faisant donc encore référence à la pierre taillée de ces époques : aitzur pour pioche, aizkor pour hache, aizto pour couteau, aiztur pour ciseau, mais aussi horma (glace) pour mur, ...
Parce que ce sera par le Royaume de Navarre, beaucoup plus tard, il y a 1200 ans, que la « basquitude » entrera dans l’histoire moderne et que l’on y trouve les origines de notre patronyme, liées à cette période.
Nous visitons aujourd’hui avec respect Aizpitarte, Santimamiñe, Urtiaga, Isturitz, Artxilondo, …, toutes ces grottes où s’est exprimé l’« art cantabrique à faciès euskarien », expression de leur spiritualité et de leurs émotions, où nos parents de cette époque ont vécu, souffert, aimé pendant la glaciation.
Passé le froid, il y a 12.000 ans, chasse et cueillette se poursuivent jusqu’à ce que nos ancêtres proto-Basques Uaskoin (Baskoinak) apprennent, des indo-européens qui vont les côtoyer, à maîtriser l’élevage qui va humaniser nos montagnes et la culture qui va enrichir nos plaines.
Cette culture indo-européenne va mettre plusieurs milliers d’années à coloniser l’Europe d’est en ouest et ne parviendra dans la zone euskarienne que très tard, il y a 2.500 ans environ.
On considére que la « vitesse » de diffusion génétique lors de ces déplacements ethniques était, en moyenne, de 3 km par génération, celle de l’interpénétration culturelle étant sans doute du même ordre.
Les Ibères se manifestent aussi, dont on ne sait pas grand chose, ni de leur origine (Afrique ?), ni de leur culture (quelques sculptures, quelques fragments d’écriture,…, en parallèle avec celle des Baskoin)
Les Celtes arrivent auxquels les autochtones résistent.
Les Baskoin (Saltus Vasconum et Vasconum Ager) décrits par les auteurs, géographes ou chroniqueurs grecs, puis romains, de Tite-Live à Ptolémée en passant bien sûr par Strabon et Pline, sont une tribu euskarienne dont le nom sera retenu comme générique des basque, gascon, bascos, vascongados, comme il l’aura été auparavant du bashkunish arabe, du bascle médiéval et bien sûr de notre euskaldun.
A côté des Uaskoin, d’autres tribus : Barduli de l’actuel Gipuzkoa, Karistiar Bizkaiens, Autrigoin des actuelles Encartaciones de l’ouest, Origévion de Bilbao, Beroin d’Arava, …
L’empreint des Celtes, très forte en Galice à l’ouest du Pays Basque sera très légère chez nous.
Epiphénomène disent les historiens.
Et pourtant il se pourrait que les tribus qui ont habité les régions dites « vascongadas », c’est à dire basquisées, soient en fait des restes des groupes celto-germaniques qui ont traversé notre pays avant de s’implanter et de se fondre dans la péninsule, restes qui se sont métissés localement et appropriés langue et culture indigène.
HDE, Histoire de l'Espagne, cite pour cette époque: «…au nord, les Basques et leurs extensions Cantabres et Astures. Peuple d’origine inconnue, sans doute l’un des plus anciens d’Espagne sinon d’Europe, les Basques résistèrent à toutes les influences. Traversés souvent, mais s’opposant à toute invasion, ils ont toujours entendu suivre le propre chemin de leurs traditions.»
Précisons ici quelles étaient les densités de population dans nos pays, mais aussi plus généralement dans le monde, suivant les époques, pour que l’on comprenne bien de quelle importance étaient les mouvements de personnes quand on parle de déplacement de groupes, de tribus, voire d’invasion de peuples, etc…
Nous étions 6.000.000.000 d’habitants (6 milliards) en l’an 2.000 ; en 1945, il y a seulement moins de 60 ans, j’allais déjà à l’école, nous n’étions que ( !) 2.000.000.000 (2 milliards), c’est à dire déjà 3 fois moins, en 60 ans.
En 1350, au moment des évènements de Proudines, l’Europe, qui compte aujourd’hui 750 millions d’habitants, n’en avait que 75 millions après le passage de la peste noire qui en avait abattu 25 millions en 3 ans
Nous verrons plus loin qu’en l’an mille, 200 ans après Charlemagne et Roncevaux, il y avait moins de 100.000 habitants pour tout le territoire basque, aujourd’hui peuplé de presque 3.000.000 d’habitants
1000 ans auparavant nos tribus basques qui voient arriver les Romains, ne comptaient que quelques milliers d’individus, 1 par km2 peut être, et les peuples « envahisseurs » eux-mêmes, antérieurs aux Romains, n’étaient sauf cas de figure que quelques centaines, voire dizaines de personnes, invasion ou propagation, parfois simple traversée, étalées souvent sur de très longues périodes.
Il y a 10.000 ans – cela semble beaucoup, en fait c’est peu, l’euskara était déjà parlé et sans doute depuis longtemps – il y a 10.000 ans donc, seulement 10.000.000 d’humains pour toute la terre, 3 fois la population d’Euskal Herria aujourd'hui; seulement 10.000 individus sur ce qui sera un jour la France et moins encore pour la péninsule ibérique; 50 à 100 personnes sur tout le territoire actuel d'Iparralde. Effarant !
Il y a 60.000 ans, avant que Cro Magnon n’habite nos régions, nous n’étions que 1 million sur terre, moins que les mammouths ou les rhinocéros !
Ainsi l’évolution du savoir, les nouvelles techniques, les changements culturels ont été le fait de quelques individus ou familles.
De même que la réaction conservatrice qui sera plus souvent culturelle que guerrière.
Après les Celtes, avec plus ou moins de pression suivant lieux ou époques et pendant 600 ans, les Romains.
« Hospitaliers et secrets, les lointains ancêtres … des Basques vivent séparés par le cloisonnement naturel, en sociétés plus ou moins grandes, modelées au prix de combien d’efforts, … sur un sol difficile. Elles y puisent leur force, leur orgueil, les habitudes qui les unissent. Habitants du plateau ou des montagnes, ils sont tous les fils jaloux des terroirs engendrés par le travail de leurs mains. Visités… mais à aucun prix dominés… »
« L’Espagne occupée (par Rome)… est limitée par les Cordillères Cantabriques, les Pics de l’Europe, derrière lesquels vivent les tribus astures et cantabres du peuple basque … » « … un foyer d’indépendance subsiste … sur l’autre versant de la Cordillère Cantabrique » HDE
L’Ager Vasconum, plaine ou campagne basque de la vallée de l’Ebre de Navarre et d’Alava, dont une partie s’appelle toujours Erribera, le bas-pays, en euskara, sera assez fortement colonisé avec création de villes et de villas et nombreuses mises en cultures, … (ainsi Pompaleo/Pamplona/Pampelune est crée en limite nord de l’Ager pour renforcer le noyau d’Iruñea existant déjà)
Le Saltus Vasconum, la forêt ou montagne basque, c’est à dire tout le reste du pays actuel, partie montagneuse de la Haute Navarre au dessus de Iruñea, Vascongadas de l’ouest, partie du nord jusqu’à l’Adour sera laissé à la « sauvagerie des barbares qui le peuplent » Lapurdum (Baiona), Carasa (Garris), Imus Pyrenaeus (Donazaharre), Easo / (Oiarzun – Hondarribia), civitas les plus proches, permettant d’avoir l’œil sur eux.
La décadence romaine au IVème siècle mettra fin à la période de pax romana.
Alains, Suèves, Vandales et surtout Wisigoths (ils auraient été 300.000, ce qui semble énorme, soldats, familles, esclaves,…, à s’installer sur toute l’Espagne) seront pendant 3 siècles de redoutables adversaires des Vascons, appelés alors Cantabres, et les hostilités seront permanentes.
« La monarchie naissante (Wisigoths) reste encore sans pouvoir … dans les régions basques, congénitalement rebelles à tout pouvoir extérieur. Le successeur d’Agila, Leogivilde, réussira l’unification (de l’Espagne) sans les Basques » HDE
Chaque roi Wisigoth a ses chroniqueurs qui écrivent : « domuit Vascones », il a dompté les Vascons. Ce qui indique bien la précarité de la réussite de l’opération.
On retrouvera aujourd'hui, 1.300 ans plus tard, la même rhétorique, obsessionnelle, dans la bouche de nos gouvernants et sous la plume des journalistes « suivistes » contemporains
Les Wisigoth installent leur royaume à Tolède, les hostilités se perpétuent, et c’est en combattant les Vascons que leur dernier Roi, Roderic/Rodrigue, apprend le débarquement des Musulmans.
« … au début de 711, le gouverneur de Tanger, Tarik, apprend que le Roi Rodéric guerroie dans le nord de l’Espagne, contre les Basques, une fois de plus révoltés. Le 24 avril, Tarik lui-même prend la tête d’un premier corps expéditionnaire, peu nombreux. Il aborde au pied d’un haut rocher auquel il lègue son nom, Djebel Al Tarik, (Gibraltar). En juin Rodéric qui combattait effectivement à Pampelune contre les Basques en insurrection, reçoit des nouvelles alarmantes d’Andalousie… » HDE. Trop tard !
En quelques années les Arabes occuperont l’essentiel de la Péninsule. Nous sommes au début du VIIIème siècle.